L’Utopie

 

Introduction

   L’utopie (littéralement, en aucun lieu) alimente les rêves et les désirs d’émancipation depuis plus de cinq siècles maintenant. Longtemps envisagée, tout à la fois, comme une arme critique et une projection plus ou moins idéal d’une meilleure manière de vivre, l’utopie a depuis été décriée de toute part. Au mieux elle est un fantasme inoffensif ou un moyen d’évasion quelque peu enfantin. Au pire, elle n’est qu’un projet totalitaire qui souhaite la fin de l’histoire. On lui oppose souvent la « réalité », des limites sociales, politiques voire physiques …

   Du côté des partisans de l’ordre marchand actuel, il n’y a de toute manière pas d’alternatives, le monde est inégalitaire, il y a les puissants et les faibles. L’utopie, en tant que désir d’un monde meilleur, est donc d’emblée condamnée. De plus, l’hégémonie capitaliste et l’état du monde qui en résulte, produisent beaucoup de désespoir et de résignation. Ce nihilisme ambiant est en partie le terreau d’idéologies morbides comme les divers fascismes et intégrismes.

   De même, dans ce climat de résignation on sent poindre des envies d’apocalypses, plus ou religieuses, qui plutôt que d’espérer un monde meilleur, perçoivent la solution dans une fin supposée du monde ou de l’espèce humaine.

  Par ailleurs, ce mode de pensée s’adapte très bien des valeurs individualistes, mercantiles et objectifiantes du capitalisme qui n’envisagent les rapports entre êtres humains que comme des rapports d’individus aliénés à individus aliénés. En gros chacun sa merde et le monde peut bien crâmer…

  Du côté des partisans de l’émancipation, utopies et révolutions se sont vites retrouvés opposées. Actuellement, on retrouve parfois cette opposition parmi celles et ceux qui se réclament du camp révolutionnaire. Du moins, le qualificatif d’utopiste ou d’utopique est parfois utilisé pour disqualifier une stratégie, pratique ou pensée que l’on juge contre-productive, irréalisable, pas digne d’intérêt voire néfaste.

   Héritage des querelles et débats politiques d’antan ? Désespoir et nihilisme face à la dégueulasserie du monde actuel et à notre manque de puissance ? Ou au contraire expression d’un besoin de changement réel, ici et toute de suite face à cette même dégueulasserie et à cette impuissance ? Probablement un peu de tout ça en même temps…

   De notre côté si nous estimons qu’il est nécessaire de s’organiser et d’avoir des débats stratégiques-théoriques sur comment arriver à cette révolution ; nous constatons,, également, que nous manquons cruellement d’imagination pour le monde que nous désirons voir advenir.

   Or l’utopie, en tant qu’arme critique, en tant que projet, en tant que production de l’imaginaire et de nos pratiques, peut nous permettre de nous inspirer, de nous réarmer afin de réenchanter concrètement ce monde. De là, les questions qu’on voulait poser et se poser :

   Quelle place pour l’utopie aujourd’hui dans la critique radicale de la société ? Quel rapport entre utopies et révolution ? Y a t-il un intérêt de produire un imaginaire positif et radical pour la constitution d’un camp et d’un mouvement révolutionnaire ? A quel point cela permet de sortir du nihilisme ambiant et de reprendre de la force?

 

Plan

I-Une courte histoire de l’utopie

A-Prémices
  1. Mythes et religions
  2. « Utopies » médiévales et millénarisme
B-Naissance de l’utopie
  1. L’utopie de Thomas More
  2. Les Lumières
C-Communautés utopiques et révolutions sociales
  1. Communautés utopiques
  2. Les révolutions et l’utopie

 

II-Utopies actuelles. Quels imaginaires?

A-L’utopie comme critique de notre présent. Contre quoi se construit l’utopie?
  1. Le capitalisme
  2.  La domination genrée
  3. La destruction du monde
B-Où chercher l’utopie?
  1. Le passé
  2. Le futur
  3. L’ailleurs
C-Utopies vs Dystopies

Tout pouvoir à la base!